Homélie du dimanche 29 mars - 5e dimanche de carême

28/03/2020 12:04

LA RÉSURRECTION DE LAZARE (Jn 11, 1-45)

« Moi, Je suis la résurrection et la vie ». Le texte original grec est plus clair que sa traduction française… on y comprend clairement que cette expression « moi, Je suis » renvoie au nom que Dieu donne à Moïse pour le désigner lors de l’épisode célèbre du buisson ardent :
« Je suis » (ex 3, 14). Par cette expression Jésus se révèle Lui-même dans sa divinité ; Et comme le Dieu qui se dévoile peu à peu au peuple élu, il s’affirme Dieu de vie : « Vous saurez que je suis le Seigneur quand j’ouvrirai vos tombeaux et vous en ferai remonter », disait le livre d’Isaïe dans la première lecture. Dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus, non seulement dit, mais il fait : Il ouvre un tombeau et en fait sortir son ami Lazare ! Forts de cette conviction de foi nous pouvons contempler le Christ, le Fils de Dieu, et nous étonner… Dieu n’est pas cet indifférent divin qui regarde du haut de Son ciel les tribulations humaines… Nous le découvrons touché par ce qui atteint l’homme, par les forces de mort qui traversent son existence … « Jésus se mit à pleurer ». Parce qu’Il est Dieu de vie Jésus est atteint, meurtri, peiné lorsque la mort triomphe… Comment ne pas regarder ce visage du Christ dans l’épreuve que connaît actuellement notre monde ? Découvrons-le navré, affecté, scandalisé avec nous de ce qui ruine tant de vies humaines.

Mais revenons à ce tombeau de Béthanie. Le tombeau est un seuil entre cette vie et l’autre ; quand nous allons au cimetière, n’est-ce pas pour scruter un au-delà de la mort ? Là, au tombeau, Jésus pose un signe… Désigner ce signe par « résurrection » est une erreur… il s’agit plutôt d’un retour à la vie. Et c’est très important de préciser cela… D’ailleurs Marthe ne s’y trompe pas ; elle dit : « Je sais qu’il ressuscitera à la résurrection au dernier jour ». Il ne s’agit donc pas (encore !) de la résurrection, mais d’un retour à la vie d’ici-bas, ici et maintenant. Par ce geste Jésus souligne tout le prix, toute la valeur de cette vie-ci. Souvent on pense que, pour Dieu, seule compterait la vie dite « éternelle »… et on aurait tendance à considérer comme vertueux ceux qui pensent ainsi. Et voilà que Jésus, au lieu de consoler les deux sœurs de Lazare par un discours sur l’espérance d’une vie au-delà de la mort (ce que vous et moi aurions sûrement fait ! Et comme le fait sûrement leur entourage pour les « réconforter »…), Jésus redonne à Lazare les moyens de vivre cette vie terrestre. Dieu en effet aime cette vie… Il nous a fait pour elle d’abord, comme ce temps fondamental offert à notre liberté d’homme pour créer ce monde (et donc l’humanité aussi!) avec lui, et y roder notre capacité d’aimer avant de le vivre dans la plénitude de l’éternité. Si Dieu aime et respecte cette vie, combien nous, ses créatures et ses enfants bien-aimés, devons la respecter et l’aimer à notre tour… et sans réserve !

Et puis il y a cette parole de Jésus à propos de Lazare, adressée aux témoins de la scène : « Déliez-le et laissez-le aller ». La mort, le tombeau, c’est tout ce qui enchaîne les hommes, les empêche de vivre à plein, libres et heureux… Accueillons-nous pour nous-mêmes cette invitation de Jésus ? Comment œuvrons-nous pour libérer tous les Lazare du monde, prisonniers de tant de linceuls ? Osons-nous reconnaître tout ce qui « sent » la mort, le dénoncer, et œuvrer dans le sens d’une libération pour la vie de tous nos frères humains ? En ce temps d’épreuve, nombreux se révèlent les sépulcres : l’isolement, la précarité, la dépression, la maladie, et cette naïveté qui fait tomber dans tous les pièges de subtils marchands de bonheur… Si notre Dieu est un Dieu de vie, nous les disciples du Christ devons être aux avant-postes de tous les grands services de la vie.

St-Paul affirme : « L’Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous ». En cette fin de carême demandons au Seigneur la grâce d’être vraiment des vivants, de nous libérer de tous les liens mortifères qui empêchent de vivre, pour que nous répondions généreusement à tout ce qui sert et fait grandir la vie.

P. François du Sartel

LECTURES DE LA MESSE

• PREMIÈRE LECTURE
« Je mettrai en vous mon esprit, et vous vivrez » (Ez 37, 12-14)

Lecture du livre du prophète Ézékiel
Ainsi parle le Seigneur Dieu :
Je vais ouvrir vos tombeaux
et je vous en ferai remonter,
ô mon peuple,
et je vous ramènerai sur la terre d’Israël.
Vous saurez que Je suis le Seigneur,
quand j’ouvrirai vos tombeaux
et vous en ferai remonter,
ô mon peuple !
Je mettrai en vous mon esprit,
et vous vivrez ;
je vous donnerai le repos sur votre terre.
Alors vous saurez que Je suis le Seigneur :
j’ai parlé
et je le ferai
– oracle du Seigneur.

• PSAUME
(Ps 129 (130), 1-2, 3-4, 5-6ab, 7bc-8)

R/ Près du Seigneur est l’amour,
près de lui abonde le rachat. (Ps 129, 7bc)

Des profondeurs je crie vers toi, Seigneur,
Seigneur, écoute mon appel !
Que ton oreille se fasse attentive
au cri de ma prière !

Si tu retiens les fautes, Seigneur,
Seigneur, qui subsistera ?
Mais près de toi se trouve le pardon
pour que l’homme te craigne.

J’espère le Seigneur de toute mon âme ;
je l’espère, et j’attends sa parole.
Mon âme attend le Seigneur
plus qu’un veilleur ne guette l’aurore.

Oui, près du Seigneur, est l’amour ;
près de lui, abonde le rachat.
C’est lui qui rachètera Israël
de toutes ses fautes.

• DEUXIÈME LECTURE
« L’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus habite en vous » (Rm 8, 8-11)

Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains
Frères,
ceux qui sont sous l’emprise de la chair
ne peuvent pas plaire à Dieu.
Or, vous, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair,
mais sous celle de l’Esprit,
puisque l’Esprit de Dieu habite en vous.
Celui qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas.
Mais si le Christ est en vous,
le corps, il est vrai, reste marqué par la mort à cause du péché,
mais l’Esprit vous fait vivre, puisque vous êtes devenus des justes.
Et si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts
habite en vous,
celui qui a ressuscité Jésus, le Christ, d’entre les morts
donnera aussi la vie à vos corps mortels
par son Esprit qui habite en vous.

• ÉVANGILE
« Je suis la résurrection et la vie » (Jn 11, 3-7.17.20-27.33b-45)

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean
En ce temps-là,
il y avait quelqu’un de malade,
Lazare, de Béthanie,
le village de Marie et de Marthe, sa sœur.
Or Marie était celle qui répandit du parfum sur le Seigneur
et lui essuya les pieds avec ses cheveux.
C’était son frère Lazare qui était malade.
Donc, les deux sœurs envoyèrent dire à Jésus :
« Seigneur, celui que tu aimes est malade. »
En apprenant cela, Jésus dit :
« Cette maladie ne conduit pas à la mort,
elle est pour la gloire de Dieu,
afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. »
Jésus aimait Marthe et sa sœur, ainsi que Lazare.
Quand il apprit que celui-ci était malade,
il demeura deux jours encore à l’endroit où il se trouvait.
Puis, après cela, il dit aux disciples :
« Revenons en Judée. »
Les disciples lui dirent :
« Rabbi, tout récemment, les Juifs, là-bas, cherchaient à te lapider,
et tu y retournes ? »
Jésus répondit :
« N’y a-t-il pas douze heures dans une journée ?
Celui qui marche pendant le jour ne trébuche pas,
parce qu’il voit la lumière de ce monde ;
mais celui qui marche pendant la nuit trébuche,
parce que la lumière n’est pas en lui. »
Après ces paroles, il ajouta :
« Lazare, notre ami, s’est endormi ;
mais je vais aller le tirer de ce sommeil. »
Les disciples lui dirent alors :
« Seigneur, s’il s’est endormi, il sera sauvé. »
Jésus avait parlé de la mort ;
eux pensaient qu’il parlait du repos du sommeil.
Alors il leur dit ouvertement :
« Lazare est mort,
et je me réjouis de n’avoir pas été là,
à cause de vous, pour que vous croyiez.
Mais allons auprès de lui ! »
Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau),
dit aux autres disciples :
« Allons-y, nous aussi, pour mourir avec lui ! »

À son arrivée,
Jésus trouva Lazare au tombeau depuis quatre jours déjà.
Comme Béthanie était tout près de Jérusalem
– à une distance de quinze stades
(c’est-à-dire une demi-heure de marche environ) –,
beaucoup de Juifs étaient venus
réconforter Marthe et Marie au sujet de leur frère.
Lorsque Marthe apprit l’arrivée de Jésus,
elle partit à sa rencontre,
tandis que Marie restait assise à la maison.
Marthe dit à Jésus :
« Seigneur, si tu avais été ici,
mon frère ne serait pas mort.
Mais maintenant encore, je le sais,
tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera. »
Jésus lui dit :
« Ton frère ressuscitera. »
Marthe reprit :
« Je sais qu’il ressuscitera à la résurrection,
au dernier jour. »
Jésus lui dit :
« Moi, je suis la résurrection et la vie.
Celui qui croit en moi,
même s’il meurt, vivra ;
quiconque vit et croit en moi
ne mourra jamais.
Crois-tu cela ? »
Elle répondit :
« Oui, Seigneur, je le crois :
tu es le Christ, le Fils de Dieu,
tu es celui qui vient dans le monde. »

Ayant dit cela, elle partit appeler sa sœur Marie,
et lui dit tout bas :
« Le Maître est là, il t’appelle. »
Marie, dès qu’elle l’entendit,
se leva rapidement et alla rejoindre Jésus.
Il n’était pas encore entré dans le village,
mais il se trouvait toujours à l’endroit où Marthe l’avait rencontré.
Les Juifs qui étaient à la maison avec Marie
et la réconfortaient,
la voyant se lever et sortir si vite, la suivirent ;
ils pensaient qu’elle allait au tombeau pour y pleurer.
Marie arriva à l’endroit où se trouvait Jésus.
Dès qu’elle le vit,
elle se jeta à ses pieds et lui dit :
« Seigneur, si tu avais été ici,
mon frère ne serait pas mort. »
Quand il vit qu’elle pleurait,
et que les Juifs venus avec elle pleuraient aussi,
Jésus, en son esprit, fut saisi d’émotion, il fut bouleversé,
et il demanda :
« Où l’avez-vous déposé ? »
Ils lui répondirent :
« Seigneur, viens, et vois. »
Alors Jésus se mit à pleurer.
Les Juifs disaient :
« Voyez comme il l’aimait ! »
Mais certains d’entre eux dirent :
« Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle,
ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? »

Jésus, repris par l’émotion,
arriva au tombeau.
C’était une grotte fermée par une pierre.
Jésus dit :
« Enlevez la pierre. »
Marthe, la sœur du défunt, lui dit :
« Seigneur, il sent déjà ;
c’est le quatrième jour qu’il est là. »
Alors Jésus dit à Marthe :
« Ne te l’ai-je pas dit ?
Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu. »
On enleva donc la pierre.
Alors Jésus leva les yeux au ciel et dit :
« Père, je te rends grâce
parce que tu m’as exaucé.
Je le savais bien, moi, que tu m’exauces toujours ;
mais je le dis à cause de la foule qui m’entoure,
afin qu’ils croient que c’est toi qui m’as envoyé. »
Après cela, il cria d’une voix forte :
« Lazare, viens dehors ! »
Et le mort sortit,
les pieds et les mains liés par des bandelettes,
le visage enveloppé d’un suaire.
Jésus leur dit :
« Déliez-le, et laissez-le aller. »
Beaucoup de Juifs, qui étaient venus auprès de Marie
et avaient donc vu ce que Jésus avait fait,
crurent en lui.